Responsabilité civile (non) - Faute du commissaire aux comptes (oui) - Absence de lien de causalité - Trib. commerce de Paris (13ème Ch.), 15 octobre 2018
Les comptes de la société K. de l'exercice clos au 31 décembre 2007 enregistraient inexactement un produit à recevoir de 4 139 000 euros. Le commissaire aux comptes a ainsi commis une faute en acceptant cette comptabilisation sans assortir à tout le moins sa certification du 13 juin 2008 d'une réserve de ce chef.
Les débats ont montré que la décision de consentir le prêt de vingt millions d'euros a été prise dans la précipitation et l'urgence compte tenu de l'assèchement des liquidités du marché de la dette par la crise, du retrait de la banque G. S. et du besoin pressant de financement de la société Pr qui avait, dès le 2 octobre 2008, acquis la société Pa. Elle a été prise en parfaite connaissance de cause des importants risques encourus ainsi qu'en témoignent les conditions du prêt consenti, pour une durée de 18 mois avec une forte marge de risque, à un taux de 15 à 16% l'an, variable selon l'évolution du ratio dette nette totale/EBITDA de l'emprunteur, en espérant s'en couvrir par les très fortes garanties exigées tenant au nantissement des titres des filiales de Pr et du groupe Pa.
Ces circonstances établissent que la détermination de Tr Holding à financer la société Pr était indifférente à l'exacte situation comptable d'une filiale telle que la société K. Dès lors, à supposer que Tr Holding en ait pris connaissance, l'éventuelle correction qui aurait pu être apportée aux comptes de K. à la suite d'une observation du commissaire aux comptes n'aurait eu aucune incidence sur la décision prise de prêter, en raison de leur niveau non significatif au regard de la taille de l'opération et des objectifs poursuivis par Tr Holding.
Il apparaît ainsi que la certification par le commissaire aux comptes des comptes de K. au 31 décembre 2007, comme l'absence de réserves sur ces comptes, n'a eu directement ou indirectement aucune influence sur la décision prise par Tr Holding de consentir le prêt à la société Pr et n'a pas de ce fait été la cause d'une perte de chance, si minime soit-elle.